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des colonies, sans autorisation du ministre de la marine et des colonies.

3. Tous les noirs ou mulâtres qui s’introduiront, après la publication du présent arrêté, sur le territoire continental de la République, sans être munis de l’autorisation désignée à l’article précédent, seront arrêtés et détenus jusqu’à leur déportation.

4. Le ministre de la marine et des colonies est chargé de l’exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin des lois.

Le Premier Consul,
Bonaparte.

Comme on voit, il y avait corrélation parfaite entre le règlement du capitaine-général de Saint-Domingue et l’arrêté des Consuls. Au 29 juillet, il ne pouvait guère avoir appris l’arrêté du 2 : à cette époque, il n’y avait point de steamers transatlantiques ; c’était donc par suite de ses instructions qu’il avait publié son règlement.

Le gouvernement consulaire, poussé par la faction coloniale, revenait ainsi aux fameuses ordonnances de Louis XVI, que nous avons signalées dans notre 1er  livre. Tandis que le capitaine-général déportait en France, des noirs et des mulâtres, militaires il est vrai, — le ministre de la marine déportait de France les hommes de même couleur qui se seraient aventurés à y venir sans autorisation[1]. Cette condition, du moins, était déjà une dérogation aux anciennes ordonnances royales qui n’en admettaient pas du tout.

Le progrès des lumières, les sentimens d’une douce philanthropie ont encore mieux fait à cet égard ; car, depuis longtemps déjà, noirs et mulâtres ont la faculté de

  1. Devenu capitaine-général, Rochambeau lit un arrêté, le 28 décembre, par lequel il déclara ne pouvoir observer celui des Consuls, attendu qu’il aurait une foule de mulâtres et de noirs à envoyer en France. Il paraît, cependant, qu’il se ravisa ensuite, car il aima mieux les faite pendre ou noyer, pour en débarrasser Saint-Domingue.