Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une lettre au général Laplume, par laquelle il réclamait de lui la restitution de sa maison, que Laplume occupait depuis son entrée aux Cayes, et des meubles qui la garnissaient. Il avait chargé un fondé de pouvoirs de poursuivre en même temps la réclamation de la main-levée du séquestre mis sur ses autres propriétés, par T. Louverture et son administration des domaines.

Or, selon les Mémoires de Boisrond Tonnerre, « Laplume n’avait jamais pu comprendre le mot de restitution.  » Maintenu par les Français dans son commandement supérieur du département du Sud, il voyait déjà avec dépit l’arrivée de Rigaud dans la colonie, et sa bonhomie le portait à croire que l’ancien général du Sud pourrait y être replacé : il le croyait d’autant plus, que noirs et mulâtres dans le Sud, aux Cayes surtout, avaient manifesté une vive joie du retour de Rigaud. Le commandement de la 13e demi-brigade donné à Pétion semblait, pour Laplume, un acheminement à cette mesure qui l’eût dépossédé de sa place. C’est la question vivace qui occasionne toujours les plaintes des hommes et leur animosité.

D’un autre côté, les colons des Cayes, qui avaient tant déblatéré contre Rigaud après sa fuite, en 1800, redoutaient sa vengeance s’il venait à être replacé dans le Sud. Entourant Laplume de leurs conseils intéressés, ils firent cause commune avec la sienne, et le portèrent à écrire à Leclerc, pour dénoncer Rigaud de violence envers un général noir, qui venait de donner à la France des preuves signalées de son dévouement par sa prompte soumission, et représenter le général mulâtre comme dangereux par l’influence qu’il exerçait sur les esprits[1]

  1. À cette époque, Leclerc excepta du blocus le port des Cayes, sur la de-