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çaient leurs projectiles contre les braves assiégés, dont l’artillerie ne pouvait guère servir qu’à repousser les attaques comme celles qui avaient eu lieu. Mais le général Rochambeau, dont la batterie de sept pièces avait éteint le feu de celles de la redoute commandée par Lamartinière, crut alors pouvoir emporter d’assaut cette redoute : il l’attaqua, perdit 300 hommes et fut repoussé victorieusement. Lamartinière jugea cependant qu’il était utile de l’abandonner, pour rentrer dans le fort, et joindre ses efforts à ceux de Magny. Cette redoute était démantelée.

Durant la canonnade et le bombardement du fort, Pétion y jeta plusieurs bombes, au dire de Pamphile de Lacroix, sous les ordres de qui il servait.

M. Madiou a cherché à l’en excuser en quelque sorte, en disant : « Pétion, quoiqu’il eût la réputation d’une grande bravoure, donnait mollement, à la tête de la 13e coloniale, depuis le commencement du siège. Les Français virent sur sa physionomie combien il lui répugnait de combattre contre ses frères noirs et jaunes.… Pétion désirait la prise de la Crête-à-Pierrot qui devait porter le dernier coup à la puissance de T. Louverture ;… il voulait que les indigènes lui sussent gré un jour d’avoir ménagé le sang de ses frères[1] »

Nous ne partageons pas entièrement cette appréciation de la conduite de Pétion en cette circonstance ; et c’est parce que nous croyons aussi qu’il désirait, et qu’il devait désirer que la résistance de T. Louverture fût anéantie une fois, que nous pensons qu’il n’agit pas mollement.

Et pourquoi n’eût-il pas eu sincèrement ce désir ? Qui souhaitait, dans toute la colonie, que T. Louverture pût

  1. Histoire d’Haïti, t. 2, p. 222.