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vage ? N’était-ce pas une opinion généralement admise, alors, que Maitland lui avait proposé de se faire Roi de Saint-Domingue, en déclarant son indépendance de la métropole[1] ? L’homme qui s’affublait, chez les Espagnols, de cordons et de croix de la noblesse, ne légitimait-il pas ces soupçons ?

Rigaud et tous les anciens libres pouvaient donc redouter les manœuvres du général en chef de l’armée. S’opposer à ses vues était donc un devoir.


T. Louverture, Roume, le Directoire exécutif, les colons, les émigrés, voulaient que le sang fût versé. Il le fut abondamment !

Quel fut, en définitive, le résultat de cette guerre fratricide, de cette immolation d’hommes dans les combats, et de l’assassinat de tant d’innocens froidement égorgés ?

« La guerre civile allumée par Maitland dans la colonie, et qu’il regardait sans doute comme le chef-d’œuvre de sa politique, fut, par le redoublement de haine qu’elle excita contre sa nation, un obstacle invincible à la réussite de ses projets[2]. »

Non, ce ne fut pas là le résultat de cette guerre. Non, ce ne fut pas Maitland qui l’alluma. Si l’on dut le soupçonner alors d’y être entré pour quelque chose, on put se convaincre ensuite que T. Louverture n’était convenu avec lui que de l’admission des bâtimens anglais sous pavillon espagnol ou américain.

  1. L’affirmation de Pamphile de Lacroix à cet égard prouve qu’on avait raison de le croire. Etablir une royauté dans la colonie, alors, c’eût été rétablir l’esclavage. Et de quelle liberté ont joui les citoyens du Nord, sous le règne affreux de H. Christophe ?
  2. Rapport de Kerverseau.