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la République. À Saint-Domingue et à la Guadeloupe, il n’est plus d’esclaves : tout y est libre, tout y restera libre. La sagesse et le temps y ramèneront l’ordre et y rétabliront la culture et les travaux. — À la Martinique, ce seront des principes differens. La Martinique a conservé l’esclavage, et l’esclavage y sera conservé. Il en a trop coûté à l’humanité, pour tenter encore, dans cette partie, une révolution nouvelle. — La Guyane, les îles de France et de la Réunion… Ces colonies si importantes sont rassurées ; elles ne craignent plus que la métropole, en donnant la liberté aux noirs, ne constitue l’esclavage des blancs.  »

Les raisons n’ont pas manqué pour justifier le maintien de l’esclavage dans les colonies, autres que Saint-Domingue. Les Mémoires de Sainte-Hélène les font connaître en ces termes :

« La loi du 30 floréal an 10 (20 mai 1802)… était juste, politique, nécessaire. Il fallait assurer la tranquillité de la Martinique qui venait d’être rendue par les Anglais. La loi générale de la République était la liberté des noirs. Si l’on ne l’eût pas rapportée pour cette colonie et pour l’Île de France, les noirs de ces colonies l’eussent relevée… Quant à la continuation de la traite des nègres, cela ne put pas affecter les noirs de Saint-Domingue qui la désiraient pour se recruter et s’augmenter en nombre ; ils l’avaient encouragée pour leur propre compte. »

Quand les chefs de gouvernement sont déchus de leur autorité, et qu’ils se voient en face de la postérité, ils sentent le besoin d’expliquer, sinon de justifier les actes les plus importans de leur administration. Mais si M. Lepelletier de Saint-Rémy est fondé à rapporter le mot cité du Premier Consul et prononcé par lui au moment où il prenait le pouvoir ; s’il a tenu d’un officier général de l’ex-