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qui méprise Dieu et ses divins préceptes, qui ne chérit pas ses premiers parens, aimera-t-il ses semblables ? Père et mère honoreras, afin que tu vives longuement, est un des premiers commandemens de Dieu[1]. Un enfant qui ne respecte pas son père et sa mère, écoutera-t-il les bons conseils de ceux qui lui sont étrangers ? Obéira-t-il aux lois de la société, celui qui a foulé aux pieds la plus sainte et la plus douce loi de la nature ? Et cependant, avec quelle négligence les pères et mères élèvent-ils leurs enfans, surtout dans les villes ! Au lieu de les instruire dans leur religion, d’exiger d’eux le respect et l’obéissance qui leur sont dus, de leur donner des idées conformes à leur état ; au lieu de leur apprendre à aimer le travail, ils les laissent dans l’oisiveté et dans l’ignorance de leurs premiers devoirs : ils semblent mépriser eux-mêmes et leur inspirer le mépris pour la culture, le premier, le plus honorable et le plus utile de tous les états. À peine sont-ils nés, on voit ces mêmes enfans avec des bijoux et des pendans d’oreilles, couverts de haillons, salement tenus, blesser par leur nudité les yeux de la décence. Ils arrivent ainsi à l’âge de douze ans, sans principes de morale, sans métier, avec le goût du luxe et de la paresse pour toute éducation. Et comme les mauvaises impressions sont difficiles à corriger, à coup sûr, voilà de mauvais citoyens, des vagabonds et des voleurs ; et si ce sont des filles, voilà des prostituées, toujours prêts les uns et les autres à suivre les impulsions du premier conspirateur qui leur prêchera le désordre, l’assassinat et le pillage. C’est sur des pères et mères aussi vils, sur des élèves aussi dangereux, que les magistrats du peuple, que les commandans militaires doivent avoir sans cesse les yeux ouverts, que la main de la justice doit toujours être étendue.

Les mêmes reproches s’adressent également à un grand nombre de cultivateurs et cultivatrices sur les habitations. Depuis la révolution, des hommes pervers se sont adressés à des lâches, à des perturbateurs, et leur ont dit : que la liberté était le droit de rester oisif, de faire le mal impunément, de mépriser les lois et de ne suivre que leurs caprices. Une pareille doctrine devait être accueillie par tous les mauvais sujets, les voleurs et les assassins. Il est temps de frapper sur les hommes endurcis qui persistent dans de pareilles idées ; il faut que tout le monde sache qu’il n’est d’autre moyen pour vivre paisible et respecté, que le travail, et un travail assidu.

  1. Et celui-ci ? Homicide, point ne seras… T. Louverture l’ignorait-il ?