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Si, au contraire, Bauvais se fût déclaré en faveur des prétentions de T. Louverture qui, à titre de général en chef appuyé de Roume, voulait exiger la soumission de Rigaud à ses ordres, ce dernier, convaincu qu’il ne pourrait plus résister, eût nécessairement persévéré dans sa demande de démission ; il n’eût pas eu l’espoir de conserver le commandement du Sud, diminué des communes du Grand-Goave et du Petit-Goave qu’il remit à Laplume ; trouvant dans son élection de député au corps législatif, faite en avril 1798, un prétexte, un motif honorable pour se retirer de la colonie, il n’eût pas accepté l’insidieux arrêté de Roume, du 21 pluviôse, ou il se fût soumis au général en chef.

La conduite inintelligente de Bauvais fut donc cause de la continuation de ces fatales dissensions entre les deux rivaux qui se disputaient, l’un la totalité du pouvoir, l’autre une portion restreinte de ce pouvoir. On va le voir persévérer dans ce que nous appelons sa coupable neutralité, parce qu’elle a été cause, en partie, de la guerre civile qui a surgi de ces dissensions. Cette guerre a eu certainement pour moteur, la perverse politique du Directoire exécutif et de tous ses agens obéissant à ses instructions, laquelle a fait naître la jalousie du pouvoir entre T. Louverture et Rigaud, qui l’a entretenue en secondant puissamment les élémens de discorde qu’elle a trouvés dans leur rivalité et dans la jalousie préexistante entre les diverses provinces de Saint-Domingue. Mais, selon nous, il était possible de l’éviter, si Bauvais eût agi autrement qu’il n’a fait.

Est-ce que Rigaud ne la pressentait pas, même depuis les premiers jours de 1797, lorsqu’il envoya Pelletier et d’autres agens secrets auprès de T. Louverture, lorsqu’il