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encore à Laveaux au sujet de Joseph Flaville à qui Maurepas imputait dès propos tenus à l’Acul, contre le travail ; T. Louverture insistant, Flaville est relevé de son poste et envoyé définitivement au Cap. Mais là-même, loin de lui échapper, cet homme inconséquent devint peu après un agent secret pour T. Louverture.

Si nous avons cité ces différentes lettres, si nous sommes entrés dans tous ces petits détails, c’est qu’il nous a paru important de constater à quelle cause on peut attribuer le commencement, l’origine de la division survenue entre T. Louverture et Villatte. C’est, comme il est évident, à la jalousie du pouvoir, et non à aucune pensée, aucune différence de couleur entre eux. Si Rigaud, en arrêtant Montbrun, a pu se laisser influencer par l’idée de se débarrasser, dans l’Ouest, d’un concurrent plus redoutable à son pouvoir que Bauvais (et certes sans aucune pensée de couleur) pourquoi n’en serait-il pas de même entre T. Louverture et Villatte, de quelque côté que soit venu le premier tort ? Que les préventions et les rancunes de Laveaux, d’abord, contre Villatte et les hommes de couleur en général, que celles de Sonthonax ensuite, aient saisi l’occasion pour tâcher de faire naître une distinction de couleur dans la colonie entre les noirs et les mulâtres, toujours est-il qu’on peut reconnaître que de la part de ces derniers, il n’en était pas question. Quand des blancs se divisent entre eux à propos du pouvoir, on ne peut certainement pas attribuer de telles querelles à la couleur des hommes : Garran a constaté cette jalousie du pouvoir entre Sonthonax et Polvérel, pendant leur mission à Saint-Domingue. Les noirs entre eux peuvent être jaloux les uns des autres par les mêmes causes, les mulâtres également ; tous les hommes, quels qu’ils soient,