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de foi, qui l’aurait entendu de la bouche de T. Louverture qui le prononça d’une voix creuse et inspirée.

Les Mémoires prennent quelquefois la forme du Roman, et dans cette circonstance, Pamphile de Lacroix en a fait un, d’après son créole.

Il produit ce prétendu monologue et ce voyage de Rigaud, après la prise de possession du Môle. Or, nous avons prouvé qu’Hédouville ne manda que T. Louverture auprès de lui, qu’il n’avait pas appelé Rigaud, même pour le premier voyage de ce général. Nous avons encore prouvé qu’en sortant du Môle, T. Louverture était au Port-de-Paix le 13 octobre, et aux Gonaïves le 21 ; qu’il fut de ce dernier lieu sur l’habitation D’Héricourt, pendant que l’affaire du Fort-Liberté se passait ; et cela, d’après ses propres lettres. Son rapport au Directoire exécutif, dont nous avons cité un passage expliquant sa conduite dans cette circonstance, corrobore les faits déclarés par lui dans sa correspondance avec Hédouville[1]. Il n’était donc pas au Port-au-Prince en ce moment. S’il n’y était pas, et si Rigaud n’a pas été appelé par l’agent (dont nous avons lu toute la correspondance officielle), comment donc ce monologue aurait-il pu être tenu ? Cette fable, ingénieusement inventée après les événemens, est détruite par ces circonstances mêmes. Le lecteur n’a qu’à prendre le volume de Pamphile de Lacroix pour s’en convaincre ; car, s’il fait aller Rigaud au Cap, il a soin de ne pas dire comment il est retourné dans le Sud.

Quant à M. Madiou, qui admet comme nous, deux voyages de T. Louverture au Cap, et un seul de la part de Ri-

  1. Kerverseau dit aussi : « Avant et lois de l’événement du Fort-Liberté, le général en chef était à D’Héricourt. »