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jours au Cap, en ne parcourant pas les villes de la colonie, dès que l’évacuation de celles de l’Ouest lui eut donné cette faculté, pour se faire voir aux populations, pour les entretenir des sentimens du Directoire exécutif à l’égard de la liberté et de l’égalité, et exercer ainsi son prestige. Était-ce une disposition de ses instructions, ou agissait-il d’après sa propre pensée ? Ou bien encore, sentait-il, en homme d’honneur, qu’il devait s’abstenir de ces communications verbales qui eussent donné des assurances qu’il savait contraires aux intentions réelles du gouvernement français ?

Quoi qu’il en soit, la mésintelligence entre lui et le général en chef allait croissant chaque jour.

Étant à Descahos, où il méditait, le 16 septembre, T. Louverture l’informa du licenciement qu’il avait opéré d’environ 3,000 soldats dans les 8e, 10e et 12e demi-brigades, pour les renvoyer à la culture ; de la nomination du colonel Mamzelle, chef de ce dernier corps, au commandement de Neyba, à cause de son influence sur les noirs à demi sauvages du Maniel et du Doko. Il termina sa lettre en demandant un passeport à Hédouville, pour son secrétaire Guybre qu’il envoyait auprès du Directoire exécutif, afin de solliciter sa retraite.

Ce nouveau Machiavel essayait ainsi d’endormir Hédouville sur son projet réel, et de faire penser au Directoire exécutif qu’il était d’une abnégation, d’un désintéressement extraordinaire. Guybre aura à peine passé le tropique, que l’agent du Directoire sera aussi en route pour gagner les rives de la France. Répondant à sa lettre deux jours après, ce dernier désapprouva le licenciement déjà opéré, en ordonnant de ne plus en faire jusqu’à ce qu’il prît lui-même une mesure