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mais Bradford se donna la mort pour ne pas survivre à sa défaite. Cette affaire eut lieu le 29 décembre[1]. C’est à cette époque que les Anglais firent offrir trois millions de francs à Rigaud pour trahir ses devoirs. Il repoussa cette offre avec mépris pour ses auteurs.

Rigaud confia le commandement de Tiburon à Dartiguenave qui le garda par la suite, malgré diverses tentatives faites par les Anglais.


Ainsi se termina l’année 1794.

Dans le deuxième livre de cet ouvrage, nous avons vu que cette année commençait sous des auspices peu favorables à la cause de la France à Saint-Domingue. Six mois sont à peine écoulés depuis le départ des commissaires civils, que déjà dans l’Ouest et dans le Sud, deux villes, places fortes importantes par leur position, tombent au pouvoir des républicains qui les arrachent aux mains des Anglais.

Dans l’Artibonite et dans le Nord, sept bourgs non moins importans sont enlevés aux Espagnols, et la ville de Saint-Marc a failli subir le même sort.

D’un côté, c’est Rigaud, de l’autre, c’est T. Louverture qui se distinguent tous deux par ces succès éclatans. À ce moment, leur valeur personnelle et leur génie d’organisation leur ont conquis, — au premier, la position où il est considéré comme personnifiant la classe des anciens libres, — au second, celle où il personnifie la classe des nouveaux libres. Leurs talens militaires leur assurent ce rang parmi leurs frères. Emules de courage et de gloire, ils vont continuer de justifier l’espoir qu’on place en eux, sous le

  1. M. Saint-Rémy s’est trompé en plaçant ce fait au 9 décembre 1795 ; la date républicaine qu’il y donne démontre le contraire. Il dit que c’est le 9 nivôse an 3 : cette date correspond au 29 décembre 1794.