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classe. Ce fut un nouveau tort de sa part. Il a préparé ainsi la voie sacrilège où la métropole est entrée ensuite, pour dominer toute la race noire, par la division qu’elle sema entre ses supériorités ; et après avoir accompli cette œuvre infernale, elle en est venue naturellement au rétablissement de l’esclavage, c’est-à-dire, à la pensée de le rétablir à Saint-Domingue ; car elle réussit ailleurs.

Certes, il nous est permis de croire que Sonthonax dut alors reconnaître d’autant plus les fautes commises par lui dans sa seconde mission, que celui que ses mains avaient élevé, donna lieu à la conception de cette idée, par son administration oppressive[1].

Nous concluons donc, que Sonthonax ne haïssait pas la classe des hommes de couleur ; et la preuve, c’est qu’il choisit sa famille dans cette classe. Il y eut erreurs nombreuses de sa part ; il pécha par la fougue de son caractère.

Interprète éclairé de la bonté providentielle, dans sa première mission il a favorisé ses desseins sur la race noire tout entière ; et quelle qu’ait été sa conduite dans la seconde, sachons lui conserver la juste considération qu’il mérite, malgré ses torts, ses erreurs et ses fautes. Inscrivons son nom dans nos fastes, à côté de celui de Polvérel, à qui nous n’avons eu à reprocher qu’une seule faute. Souvenons-nous enfin, que les peuples n’arrivent à leurs destinées, qu’en passant par des torrens de sang.

  1. C’est probablement pour avoir reconnu ses erreurs et ses torts, qu’en 1803, jeté en prison à la Conciergerie, il se rapprocha de Pinchinat qui y végétait dans la misère. C’est encore par ces motifs qu’il rendit justice à Rigaud, à la fin de 1799.