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père ; et par une trame horrible, les ingrats n’ont-ils pas voulu me livrer à nos ennemis ? Les scélérats se repentiront un jour de leurs mauvais procédés. »

Nous ne saurions approuver cette lâche conduite et la perfidie des hommes de couleur ; mais en fait de trahison, T. Louverture ne nous semble pas un très bon juge : il aurait dû comprendre qu’il n’en avait pas seul le honteux privilège. Toutefois, nous signalons au lecteur la promesse qu’il se fit à lui-même d’exercer un jour des vengeances, et le lecteur verra que Laveaux ne négligea pas d’exploiter cette fâcheuse disposition.

Cet échec ne le découragea pas. Ne pouvant agir à cause de sa blessure, il fit marcher ses soldats de nouveau contre Saint-Marc, sous les ordres de Guy, Blanc Cazenave et Morin, ces trois mulâtres qui lui restèrent fidèles. Dans sa même lettre à Laveaux, il leur rend justice des efforts qu’ils firent pour reprendre Saint-Marc, dont ils ne purent s’emparer faute de munitions et n’étant pas secondés par le bonheur.

Renonçant alors à cette entreprise, il fit occuper les Vérettes, le Pont-de-l’Ester et la Petite-Rivière par ces trois officiers.

Apprenant en ce moment que les Espagnols reparaissaient du côté de la Marmelade, il s’y porta rapidement ; et partant de là, le 9 octobre, avec une troupe de près de 5 mille hommes, il enleva d’assaut, dans la nuit du 20 au 21, le bourg de Saint-Raphaël. Il eut le même succès contre Saint-Michel. Dans ces deux endroits, toute l’artillerie et les munitions tombèrent en son pouvoir. Laveaux atteste qu’il grâcia tous les Français qu’il fit prisonniers. Il paraît qu’à cette occasion, le gouverneur général lui envoya un plumet de grenadier qu’il porta dès-lors à son