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nombreux déserteurs français, en fit fusiller 60 et continuait cette affreuse boucherie, lorsqu’il y arriva et la fit cesser. Il n’en accuse pas Villatte.

Presque en même temps, Laveaux fit fusiller Belle-Ile, blanc, maire de Bombarde, qui tramait dans ce lieu en faveur des Anglais. Deux ou trois fois traître, il méritait sans doute ce malheureux sort.

Le 19 juillet, T. Louverture écrivit une lettre à Laveaux, en apprenant le massacre des Français au Fort-Dauphin. Nous y remarquons ce passage : « Vous pouvez compter, général, sur mes sentimens d’humanité. J’ai toujours eu en horreur ces chefs qui aiment tant à répandre le sang. Ma religion me le défend, et j’en suis les principes. » — Nous prenons bonne note de cette confession. Dans cette lettre, il prenait le simple titre de serviteur de la République[1].

Quelques jours auparavant, il écrivait à Laveaux, qu’il avait lu le décret de la convention sur l’abolition de l’esclavage, et qu’il lui demanderait bientôt une entrevue pour conférer ensemble. Jusque-là, en juillet, il n’avait pas encore vu Laveaux.

À peu près à la même époque, secondé par Blanc Cazenave, il enleva le poste du Pont-de-l’Ester aux mains des Anglais. Guy, homme de couleur, lui livra alors la Petite-Rivière de l’Artibonite qui était occupée par les Espagnols. Ce fait est constaté par Laveaux dans son compte-rendu.

  1. Nous avertissons le lecteur, que toutes les lettres que nous citerons de T. Louverture proviennent des archives générales de France, à Paris ; Laveaux les avait sans doute remises au gouvernement français.

    Partout où l’historien peut trouver un document utile à la manifestation de la vérité, il doit le saisir. La vérité est, et doit être inexorable ; et l’historien se déshonorerait à ses propres yeux, s’il la cachait à la postérité qui doit juger les hommes.