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nomd, les troupes européennes seules et la garde nationale blanche donnèrent, que les soldats de la légion du Sud se prirent d’une terreur panique et se mirent à fuir : « Ils se montrèrent aussi lâches et indisciplinés dans cette affaire, qu’ils se sont montrés féroces et sanguinaires dans les troubles civils. Le général Desfourneaux fut obligé de faire sa retraite  : elle fut honorable. » Il fallait une cause à cette déroute, et ce furent les soldats noirs et mulâtres qui en furent accusés.

« Les délégués étaient instruits de l’esprit de vengeance qui animait les troupes légionnaires contre le général Desfourneaux ; il leur avait fait, avec justice, de violens reproches sur la lâcheté qu’ils avaient montrée dans l’attaque ; mais il généralisa beaucoup trop ces reproches qui humilièrent tout un corps, qui, quand il s’agit de vengeance, est habile à en faire naître l’occasion. La perte du général Desfourneaux fut jurée ; des promotions à des grades militaires ne purent raccommoder les affaires de la délégation que le général Desfourneaux perdait par trop de zèle… »

Nous avons tenu à faire accuser Desfourneaux par les délégués eux-mêmes. On voit ce qu’ils en disent. Le fait est, que ce général accabla d’injures et de vexations les noirs et les mulâtres de la légion, en attribuant à eux seuls son insuccès ; sa grossièreté soldatesque ne connut aucune borne dans les termes de mépris dont il se servit à leur égard. Ce zèle de caserne ruina en effet le crédit dont les délégués avaient besoin pour se soutenir dans leur odieuse mission ; et ces délégués ne disent pas qu’ils y ajoutèrent par leurs propres reproches, leurs propres injures adressées aux soldats de la légion. Nous exceptons toujours Kerverseau : c’est de Leborgne et de Rey que nous parlons.