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dans notre deuxième livre. D’un caractère brutal envers ses inférieurs, jurant toujours, étourdi, inconséquent, mais dévoué à Sonthonax à qui il avait dû son avancement, il avait été nommé d’abord commandant général ; mais, par réflexion, on changea ce titre en celui d’inspecteur général des troupes du Sud et de l’Ouest, pour dissimuler sa mission réelle.

Son aide de camp Édouard, d’une taille avantageuse, d’une figure assez belle, avait été au service de Philippe-Égalité. C’était un jeune présomptueux, se croyant fort supérieur aux noirs de la colonie, pour avoir été en France.

La délégation trouva aux Cayes, un jeune homme de couleur nommé Lilladam qui, de France, passa à Londres et s’y enrôla, en 1794, dans la légion des émigrés que Venault de Charmilly y organisa pour Saint-Domingue. Bientôt éconduit de ce corps à cause de sa peau jaune, il se rendit aux États-Unis, d’où il vint aux Cayes, au commencement de 1796. Là, il fut accueilli par Rigaud, qui ignorait ses antécédens et qui l’employa. Mais, à l’arrivée de la délégation, il se rallia à elle et se dévoua avec zèle à servir ses vues.

Tels furent les hommes que l’agence opposa aux défenseurs de la République française dans le Sud. Partis du Cap le 16 juin, sur les corvettes la Doucereuse et l’Africaine, les délégués se firent débarquer à Tiburon avec une trentaine d’officiers : le reste des militaires continua sur ces navires pour les Cayes ; c’étaient des soldats européens.


En débarquant, les délégués passèrent l’inspection des troupes ; ils demandèrent combien il y avait d’officiers noirs dans la garnison : il y en avait une douzaine de présens. Et aussitôt ils commencèrent à reprocher aux