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c’était le tripotage de Perroud dans l’administration des finances, qu’il travaillait à sa guise (pour nous servir de l’expression de Rochambeau) ; c’était ce tripotage, autorisé par Laveaux, qui mécontentait les cultivateurs du Port-de-Paix, comme il avait mécontenté les officiers du 1er régiment commandé par Rodrigue, et tous les habitans du Cap. Au lieu de mettre un terme à ce scandale financier, on trouvait plus commode d’accuser les hommes de couleur de tous les faits de brigandage qui en étaient la conséquence, bien qu’ils en fussent victimes.


Tandis que ces faits se passaient dans le quartier du Port-de-Paix, d’autres faits tout aussi graves avaient également lieu à l’intérieur, dans les paroisses avoisinant le Cap. Les noirs de la troupe de Villatte, le voyant déporter en France, reprirent les armes en demandant que ce général leur fût remis. À eux s’en joignirent d’autres, de la Grande-Rivière particulièrement, auxquels l’agence avait fait distribuer des armes apportées avec elle de France. À ce moment, le baron de Cambefort et le marquis de Rouvray, qui se tenaient toujours à Banica avec les Anglais, profitant des mauvaises dispositions de ces insurgés, revinrent les pousser à la révolte contre l’autorité française. En vain l’agence chargea le général Pierre Michel de les harceler : n’ayant pas su tirer parti d’un premier succès obtenu contre eux, il revint au Cap. L’agence considéra alors la situation assez périlleuse, pour émettre une proclamation, le 1er fructidor (18 août), qui déclara la partie du Nord en danger ; c’est-à-dire, pour pouvoir y établir la loi martiale, l’état de siège. Le 6 août, elle avait proclamé la constitution, qui se trouvait alors suspendue.