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lerai : ce dernier était un officier qui avait combattu les Anglais avec une valeur éprouvée, sous ses ordres. Mais ils sont des mulâtres ! — « La méfiance, dit T. Louverture, est toujours la mère de toute sûreté.  »

Il n’a oublié ce proverbe qu’une seule fois, — le jour où le général français Brunet l’a invité à venir chez lui, pour l’arrêter et le déporter en France.

Dans son aveuglement, il se méfiait des mulâtres ; il se confia aux blancs. Sont-ce les mulâtres qui l’ont fait périr ?…

Cette même lettre, adressée à Laveaux, lui donna un avis concernant Sonthonax :

« J’écris par ce courrier au commissaire Sonthonax, et je lui donne connaissance de ce que les méchans débitent sur son compte, pour égarer les crédules cultivateurs et autres. On leur fait accroire qu’il est revenu de France pour les remettre dans l’esclavage, et une quantité d’autres absurdités. »

Comment Sonthonax ne reconnaîtra-t-il pas un dévouement sincère en T. Louverture qui lui donne des avis si salutaires !

Le 27 juin, nouvelle lettre à Laveaux :


Je vois avec plaisir que la commission va fixer les limites de votre commandement en chef, avec celui du général Rochambeau, et les commandemens des généraux divisionnaires et ceux des généraux de brigade, sous les ordres des généraux divisionnaires. Comme vous me dites qu’il va peut-être me falloir deux généraux de brigade, et comme Bauvais est déjà sous mon commandement, il ne m’en faudra plus qu’un ; et comme je suis pur et sincère, et que j’aime l’ordre et la tranquillité, je ne veux que des hommes comme moi (des noirs). Par conséquent, je ne vois dans tous ceux que vous me nommez, que Pierre Michel qui me convient, ou bien Bedos ou Pageot (deux blancs)[1].

  1. Nous verrons plus tard ce que devint Pierre Michel, d’après ses ordres à H. Christophe. À ses yeux, les deux blancs valaient ce noir.