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rité, cela ne pouvait point convenir à la métropole qui, naturellement, avait ses sympathies pour les blancs. Son gouvernement d’alors, de même que celui qui lui succéda, ne pouvait pas admettre que les blancs fussent effacés[1]

Il fallait reconstituer la puissance de ces derniers, malgré la trahison des colons qui avaient livré la colonie à la Grande-Bretagne et à l’Espagne, malgré le dévouement de ceux des hommes de couleur restés fidèles à la France.

Joignez à cette considération politique, l’influence exercée sur l’esprit du gouvernement et sur celui de Sonthonax, par l’affaire de Montbrun contre Desfourneaux, par les dénonciations incessantes adressées par Laveaux et Perroud à la métropole, contre Villatte et tous les hommes de couleur du Nord, et par les insinuations, les suggestions relatives à Pinchinat dont la capacité politique n’était pas contestable, à Rigaud, à Bauvais qui se distinguaient dans l’Ouest et dans le Sud et qui conquéraient par leur épée une position supérieure.

L’agence venait donc pour rétablir la puissance des blancs. Elle arriva, et que trouva-t-elle en débarquant au Cap ? L’affaire du 30 ventôse et ses suites. Dès-lors, cette agence pouvait-elle ne pas s’empresser de mettre à exécution le système préconçu ? Quel était le meilleur moyen de le faire réussir ? Celui qu’on a employé.

Accuser toute la classe des hommes de couleur « du complot affreux, du projet d’établir sur la destruction de la couleur blanche et sur l’ignorance des noirs, le triomphe de la couleur jaune et l’élévation de quelques individus accrédités ; de conspirer contre la sûreté de

  1. Nous prions le lecteur de relire le discours de l’abbé Maury, au tome premier, pages 173 à 175. En 1796, le gouvernement français et Sonthonax se pénétrèrent de ses idées.