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considéraient point comme un ennemi de la liberté générale ?


Continuons à citer la correspondance de cette époque.

Le 1er germinal, le lendemain de l’arrestation de Laveaux et Perroud, qui se trouvaient encore en prison, T. Louverture adressa une lettre à Adet, ministre de France aux États-Unis ; elle est datée des Gonaïves. Il disait à Adet :


L’attentat le plus horrible et le complot le plus infâme viennent d’éclater dans la ville du Cap. La souveraineté nationale est outragée, dans ce moment, dans la personne du gouverneur général et de l’ordonnateur civil de Saint-Domingue. Le coup le plus funeste est porté aux principes de la convention nationale, à la liberté et à l’égalité ; et si le projet des factieux eût eu le plein succès qu’ils en attendaient, c’en était fait de la race blanche européenne dans cette partie de la République : l’existence entière de cette race était menacée par les méchans, et l’esclavage allait succéder à la liberté. Mais l’Etre suprême, qui veille sans cesse sur les bons, n’a pas permis que le crime fût consommé : il a voulu me conserver en me faisant éviter leurs pièges… Une centaine de citoyens de couleur se sont portés au gouvernement, armés de poignards et de pistolets ; cette troupe d’assassins, parmi les quels il n’y avait pas un citoyen blanc, pas un citoyen noir, etc.


Cette lettre se terminait par l’invitation faite à Adet, d’instruire la France de cet événement.

C’est le 21 mars que T. Louverture l’a écrite : ce n’est que le 26 que Laveaux lui-même lui a écrit, en lui disant qu’il n’y avait que des hommes de couleur qui l’ont arrêté, et le 21, T. Louverture affirmait déjà cette imputation à Adet ! Par l’accusation qu’il porte contre les hommes de couleur, d’avoir eu le projet de détruire tous les blancs pour rétablir l’esclavage des noirs, on voit qu’il s’était entendu d’avance à ce sujet avec Laveaux. Cette accusa-