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Quittons ce théâtre ensanglanté pour voir ce qui se passa à Jacmel, après le départ des commissaires civils.

On se rappelle les termes de la lettre du 11 juin, adressée par Polvérel à Rigaud, concernant Montbrun. Celuici fut peut-être le seul qui ignorât alors les conseils inspirés, donnés au gouverneur général du Sud à son égard. Mais Bauvais et les autres principaux officiers durent le savoir, sinon immédiatement, du moins peu de temps après.

Au départ de Martial Besse avec les commissaires, Montbrun était rentré dans l’exercice de ses fonctions de gouverneur général de l’Ouest. Suivant ses écrits publiés en France, son premier soin fut de donner à Bauvais le commandement de la légion de l’Ouest, et de l’envoyer dans le canton de Saltrou pour en chasser les Anglais et les émigrés qui s’étaient emparés de ce point, afin de relier leurs opérations avec la Croix-des-Bouquets, par les montagnes. Bauvais ne réussit pas alors dans cette campagne[1]. Il reçut néanmoins de Montbrun le commandement de l’arrondissement de l’est, formé de ce canton, et de celui de Marigot ; et Déléard Borno, frère de Marc, fut placé à Marigot ; ce qui permit à Bauvais de se tenir à Jacmel, où était la plus grande partie de la légion qu’il commandait.

D’après Montbrun lui-même, étant au Port-au-Prince, il s’occupait d’entreprises industrielles et d’opérations commerciales. On a vu que l’émigré Larue lui parlait de ses richesses, dans sa lettre insidieuse dont nous avons fait mention dans le deuxième livre. Il y avait relevé une guildive où il faisait fabriquer du tafia, qu’il vendait à

  1. Mémoire de Rigaud, en 1797, p. 29.