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Sans contredit, Villatte était un bon militaire, brave et intrépide, fidèle à la France, alors notre patrie ; il a eu le mérite d’avoir défendu le Cap et ses dépendances contre les Anglais et les Espagnols, d’avoir honorablement résisté à toutes leurs offres, à toutes les séductions qu’ils employèrent pour le porter à trahir ses devoirs ; il a maintenu l’ordre et la discipline parmi les troupes qu’il commandait, tracé le noble exemple de subir toutes les privations auxquelles les habitans étaient en proie dans son commandement. Mais il n’était qu’un soldat, qui savait seulement aller rondement en besogne, selon son expression dans sa lettre à Laveaux, en date du 22 février 1795 : il était incapable de combinaisons politiques, et il l’a prouvé au 30 ventôse.


Pour l’instruction de nos lecteurs, mettons en regard, à côté de notre appréciation du caractère et de l’incapacité de Villatte, l’appréciation que nous fournit le rapport de Marec, sur la capacité de Laveaux. Après avoir résumé la situation de Saint-Domingue, d’après la correspondance des deux hauts fonctionnaires de cette colonie, Marec dit au conseil des Cinq-Cents :

« Mais cette situation n’est en général que la situation militaire de la colonie à cette époque, et c’est la situation politique et commerciale que le conseil des Cinq-Cents a désiré surtout connaître. J’observe que depuis le départ pour France des derniers commissaires civils à Saint-Domingue, la colonie n’a cessé d’être régie sous l’empire du gouvernement militaire, gouvernement robuste de sa nature, et le seul peut-être qui conviendrait à cette colonie jusqu’à la pacification générale ; mais gouvernement devenu sans vigueur et sans efficacité dans les mains débiles qui en