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une au cou. Il fut aussitôt remplacé de fait, dans le gouvernement de Saint-Domingue. Dès ce moment il ne put rien faire sans l’aveu de T. Louverture, sans prendre ses conseils, nous allions dire ses ordres. Il en fut ainsi jusqu’à l’arrivée de Sonthonax, qui eut lieu peu après, lequel l’effaça encore de fait, jusqu’à ce qu’enfin T. Louverture le fît nommer membre du corps législatif, en lui donnant cette planche de salut pour sortir honnêtement de la colonie.

Avant d’avoir récompensé les services de T. Louverture, Laveaux avait reconnu ceux des colonels B. Léveillé, Pierre Michel et Pierrot, en les élevant au grade de général de brigade. Certes, on ne peut le nier, sans eux le gouverneur et l’ordonnateur ne fussent pas sortis de prison, et peut-être même qu’à la fin ils eussent péri. Il ne fît donc rien de trop par cette promotion ; mais comme ils avaient agi sous l’inspiration de T. Louverture, qui depuis longtemps leur avait envoyé des hommes de confiance[1], il était juste que ce dernier reçût quelque chose de plus distingué, et ce fut la lieutenance du gouvernement.

C’est à cette occasion que Laveaux, dans son enthousiasme philantropique, représenta T. Louverture comme le Spartacus prédit par Raynal, dont la destinée était de venger les outrages faits à toute la race noire. Ce gouverneur aimait à faire preuve de ses connaissances en histoire : ainsi, le rapport de Marec dit qu’en rendant compte au gouvernement français des motifs qu’il avait eus pour mettre Rodrigue en liberté, lors de son arrestation, il écrivait : « Que, voulant imiter l’empereur Titus,

  1. Voyez sa lettre du 21 février à Laveaux au chapitre V.