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Cette coexistence même des deux faits indique que ce ne fut pas le motif de la partialité de Rigaud et de Sauvais. Selon nous, elle dut avoir pour motif le mécontentement de ces deux généraux contre Pétion, qui avait pris parti pour Montbrun, dans ses démêlés avec eux. Au moment où cette relation fut publiée, on ne pouvait guère avoir appris ce qui s’était passé au Cap, pour pouvoir en juger en connaissance de cause.

Ce fut un tort grave de la part de ces deux généraux, de ne pas mentionner Pétion dans leur relation. Mais Pétion ne se laissa pas influencer par cette injustice, pour négliger son devoir comme militaire : des faits honorables de sa part le prouveront par la suite. Nous remarquons dans le mémoire de Rigaud, en 1797, qu’il répara son tort, en le faisant encore de mauvaise grâce : en parlant de la défense de Léogane, il y cite nommément Renaud Desruisseaux : « Il était secondé, dit-il, par des officiers d’une grande bravoure…, aussi l’escadre anglaise fut elle foudroyée…  » Il lui répugnait de nommer Pétion.

Sans nul doute, Rigaud et Bauvais durent transmettre à Laveaux la relation de la défense de Léogane, puisqu’ils lui rendaient compte de toutes leurs opérations ; mais nous ne voyons pas que le gouverneur en ait fait aucune mention dans son compte-rendu. Le rapport de Marec, du 1er mars 1797, qui relate toute la correspondance de Laveaux avec le gouvernement français à cette époque même, ne cite aucune lettre de ce gouverneur à ce sujet. C’était un fait assez remarquable cependant ; mais si nos deux généraux furent assez partiaux pour ne pas rendre justice à Pétion, il n’est pas étonnant que Laveaux fût lui-même porté à ne pas informer la métropole, de ce qui