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suite. Ils furent conduits à Léogane, et de là envoyés dans les cachots du fort de Saint-Louis.

Si l’on se rapporte à Montbrun qui y était alors, ce serait le 5 mars que Pompée, Zéphir et Saint-Cyr, trois noirs, et le blanc Baudouin y furent conduits ; que Lefranc et plusieurs autres officiers leur firent subir des traitemens atroces ; que Lefranc surtout s’y distingua ; qu’il fît mettre Pompée à la barre, les pieds croisés et les mains menottées ; qu’on lui couvrit le visage d’un masque de fer ; et ce supplice ne cessa qu’à la sollicitation de Mahé, commandant français de la frégate la Concorde, alors dans le port de Saint-Louis. Montbrun ajoute que le 22 mars, vers 5 heures du soir, arrivèrent Pierre Dieudonné, Noël, Cyprien, César et Léveillé, tous noirs ; qu’en cette circonstance, Lefranc commit encore de nouvelles barbaries contre Dieudonné, qu’il traita de la même manière que Pompée ; que, de plus, il fit passer ses mains menottées par-dessous la barre, de sorte qu’il avait le corps forcément plié en deux ; qu’une chaîne lui ceignait les reins et était attachée à un carcan qu’il avait au cou ; que le masque de fer qui avait servi à Pompée, lui fut mis de force, étant trop étroit pour sa tête ; que Dieudonné resta dans cette douloureuse position jusqu’au 31 mars où il mourut ; que Lefranc vint dans le fort, trois heures après sa sépulture, et qu’il fit exhumer le cadavre pour s’assurer de la mort de Dieudonné.

Nous avons copié textuellement ce que dit Montbrun, du sort affreux fait à ces hommes que Polvérel indiquait à Rigaud, comme n’ayant plus confiance en Montbrun. Si le lecteur croit que l’animosité de ce dernier a pu le porter à exagérer les faits, nous lui dirons qu’il produit à ce sujet un procès-verbal qui aurait été rédigé par des prison-