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Arrivés au Port-au-Prince, Polvérel et Ailhaud y furent parfaitement accueillis par la généralité des habitans de toutes couleurs.

Les blancs de cette ville, toujours parlisaus des idées et des vues de l’ancienne assemblée de Saint-Marc, agissant comme ceux du Cap dirigés alors par Daugy, Raboteau et autres, affectèrent le plus grand enthousiasme en faveur de la révolution et de la convention nationale : ils réussirent à séduire les commissaires civils. Leur but secret était d’employer l’autorité de la commission civile, comme ils faisaient en ce temps-là au Cap, à opérer l’arrestation et la déportation des partisans de l’ancien régime, pour se débarrasser de ces adversaires, sauf à se débarrasser ensuite des commissaires eux-mêmes, et à appesantir alors leur haine contre les hommes de couleur qui s’étaient confédérés avec les contre-révolutionnaires. On ne peut se dissimuler que cette tactique des colons de Saint-Domingue n’ait été fort habile : ils l’ont constamment pratiquée. Et si Polvérel et Sonthonax réussirent à la déjouer durant leur mission, les colons ne persistèrent pas moins à l’employer. Elle obtint le succès qu’ils désiraient, quand les événemens eurent placé Toussaint Louverture à la tête de l’armée coloniale. Ils le secondèrent puissamment dans les démêlés qu’il eut avec Sonthonax et Hédouville, pour arriver à cette espèce d’indépendance bâtarde qui a existé en 1801, dans laquelle ils ont joué un rôle influent. Leur but final étant de rétablir l’esclavage des noirs, il fallait commencer par la compression, sinon par l’extermination des anciens libres, mulâtres et nègres. Toussaint Louverture ne servit que trop leurs desseins, dans ses dissensions avec Rigaud, et pendant la déplorable guerre du Sud. Est-ce