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sommer, quand Laurent Joly l’abat lui-même d’une balle de son mousqueton.

Bien longtemps après, en racontant ce fait, Borgella exprimait son regret de la mort de Piment, qui défendit sa vie si vaillamment. Le terrible métier des armes a cela de particulier, qu’il laisse souvent des regrets, tandis que, dans le moment de l’action, le guerrier ne connaît autre chose que la destruction de son ennemi.

Dans les derniers jours du mois de mai suivant, Borgella avait obtenu de Marc Borno un permis pour aller à la Croix-des-Bouquets. Il y avait déjà si longtemps que les Anglais menaçaient le Port-au-Prince sans rien entreprendre, qu’on ne s’y attendait pas à une attaque immédiate. Mais le 31, ayant appris que l’escadre avait paru en force, Borgella voulut se rendre à son poste de Bizoton. Bauvais, qui venait d’apprendre que le marquis d’Espinville devait déboucher au Cul-de-Sac, le retint auprès de lui et l’emmena jusqu’à l’habitation Lafrétillière où il se porta pour s’en assurer. Le 1er juin, dans l’après-midi, entendant la canonnade, Bauvais l’expédia pour aviser Montbrun de sa position critique, étant également menacé de la marche de la colonne sortie de l’Arcahaie, sous les ordres de Lapointe et de Hanus de Jumécourt. Rendu devant le Port-au-Prince, pendant l’orage, Borgella en trouva les portes fermées : il fut contraint de retourner au poste de Pelet où il passa la nuit. Là, il se convainquit que la défection s’opérait dans les rangs des hommes qui le gardaient. Jérôme Coustard en était le chef. Au jour, il entra en ville et se rendit auprès de Montbrun qu’il trouva blesse : celui-ci lui témoigna le regret de ce qu’il fut absent de Bizoton