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gence, mais par trahison. Il n’est pas seulement soupçonné d’être un traître, mais pour eux il est réellement un traître. Il est en outre un intrigant qui livrera à l’ennemi tous les quartiers où il commandera, et qui propagera son plan de trahison dans ceux où il ne commandera pas. Polvérel n’a jamais eu confiance en sa moralité ; il n’avait compté que sur la justesse de son esprit et sur son ambition bien calculée ; mais Montbrun l’a trompé, même sur ce dernier point : il est l’ennemi de la liberté et des noirs, il assassine cette liberté en la caressant.

Voilà ce qui est clairement énoncé contre Montbrun, sur la tête duquel l’ex-commissaire appelle la vengeance de Rigaud ; car Polvérel lui dit qu’il est le seul homme, dans la colonie, qui puisse déjouer les complots de Montbrun ; que ce dernier a perdu toute la confiance des Africains, résolus à ne pas le reconnaître pour chef, parce qu’il les a trahis. Enfin, Polvérel exhorte Rigaud à se mettre à la tête de la sainte insurrection des noirs, pour l’abattre.

Cependant, qu’ont fait de ce traître l’un et l’autre commissaire, avant de partir pour la France ? Nous allons le dire, mais auparavant écoutons Garran :

« Il est pourtant vrai, dit-il, que Montbrun fut blessé à l’attaque du fort Bizoton, et que les commissaires civils se prévalurent de cet accident pour donner le commandément du Port-Républicain (de toute la province de l’Ouest) à Martial Besse, qu’ils avaient fait venir, la surveille, de la ville de Jacmel. Mais, ce changement lui-même, de quelques motifs qu’on lait coloré, et l’appel de Martial au Port-Républicain, n’indiquent probablement que la méfiance que les commissaires civils avaient déjà conçue contre Montbrun. »

Nous avons déjà dit que ce commandement fut déféré