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puta encore, ainsi qu’à Jonneau, le dessein de vouloir se ranger sous la domination britannique. Joseph, chef des noirs insurgés du Moustique, somma Laveaux de ne pas mettre à exécution le jugement porté contre les accusés, avec menaces de marcher contre le Port-de-Paix ; mais ce général l’envoya arrêter lui-même, et il subit le même sort que les autres.

Dans le temps où Sonthonax ordonnait à Laveaux, à Finiels et à d’autres commandans d’incendier et de saccager les lieux qu’ils seraient forcés d’abandonner, Laveaux s’honora en combattant cette funeste doctrine du commissaire civil en délire. Il écrivait à ces commandans :

« Inspirez à tous vos soldats que l’on fait plus dans les troubles intérieurs par une patience réfléchie que par a la violence qui, souvent, ne nous est dictée que par notre passion[1]. Je compte sur votre zèle et votre patriotisme, sur votre humanité envers tous les citoyens, sur votre courage contre les ennemis. Faites votre retraite avec prudence ; maintenez la discipline, empéchez le pillage : songez que vous êtes sur le territoire français. »

Evidemment, le militaire brave et humain l’emporta en cette circonstance sur l’homme politique au désespoir. Une si grande intelligence de la situation, réunie à tant de fermeté, gagna à Laveaux la confiance des habitans qui, à leur tour, facilitèrent sa tâche par leur bon esprit. Il y ajouta en nommant à la charge d’ordonnateur des finances, Henry Perroud, négociant au Port-de-Paix, en remplacement d’un nommé Rochefort qui s’était enfui auprès des Anglais, pour ne pas rendre ses comptes. Cet

  1. On fait encore mieux par la justice envers tous : Nous verrons que Laveaux ne comprit guêres cette vérité.