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à Bauvais « que l’état de gêne où se trouvait Pinchinat, le portait à croire que son cœur n’avait aucune part dans cet écrit… » De là, les soupçons injustes de Sonthonax, à cette époque et quelque temps après. Mais, disons avec Garran « que rien n’annonce d’ailleurs que Pinchinat ait mérité ces soupçons. »

En effet, si Pinchinat resta pauvre dans tout le cours de la révolution de Saint-Domingue à laquelle il prit une si grande part, était-ce une raison pour Savary de supposer que la gêne où il se trouvait, influençait ses opinions politiques, et d’insinuer contre lui cette accusation calomnieuse ? Dans son écrit que nous avons déjà cité, publié à Paris le 20 avril 1798, en réponse à Sonthonax, etc., Pinchinat nous donne le bilan de sa fortune. « Je déclare, dit-il, que je ne possède ni sucreries, ni caféteries, ni habitations eu plaine ou en mornes, ni maisons en ville, ni contrats, ni meubles, ni fortune pécuniaire. Ma solide fortune, celle que je ne puis jamais perdre, celle qui est au-dessus des atteintes de mes persécuteurs, c’est l’estime de tous les amis de l’humanité. »

Combien, parmi tous les hommes qui ont figuré avec quelque éclat à Saint-Domingue, en ont pu dire autant ? Cependant, Pinchinat a exercé une grande influence dans les affaires de ce pays ; il aurait pu la faire servir à se créer une fortune comme tant d’autres, et il n’en a rien fait.

Il aimait le jeu avec passion, il était de mœurs peu sévères, dit un auteur moderne que nous regrettons de contredire en ce moment[1]

  1. M. Madiou, Histoire d’Haïti, t. 1er p. 107.