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en embrassant Montbrun. Polvérel avait une trop haute idée des convenances et trop de magnanimité dans le caractère, pour se conduire ainsi.


Il nous serait impossible de ne pas réfuter également ce que nous considérons comme une injure faite à la mémoire de Pinchinat, par Pamphile de Lacroix. Le mérite de son ouvrage sur la Révolution de Saint-Domingue, l’a recommandé au public : il faut détruire ce qu’il y a de calomnieux pour un de nos premiers révolutionnaires.

En parlant du retour de Polvérel au Port-au-Prince, cet auteur prétend que « ce commissaire civil y accourut pour user de son influence sur le commandant Montbrun et sur le président Pinchinat, dont le crédit moral semblait s’être volontairement affaissé au milieu des dernières dissensions. » Ce qui revient à dire que Pinchinat, par son influence, eût pu empêcher Montbrun, plein de méfiance, d’amour-propre et d’orgueil, comme tous ceux de sa caste[1], d’agir comme il a fait au 18 mars.

Au contraire, Pinchinat devait y pousser Montbrun, et c’est probablement ce qu’il aura fait. On vient de voir que Desfourneaux l’en a accusé. Pourquoi aurait-il conseillé Montbrun de se laisser supplanter par son rival, de supporter ses arrogances ? Desfourneaux avait-il plus de mérite que Montbrun ? Et Pinchinat, mulâtre, n’avait-il pas aussi sa méfiance, son amour-propre, et son orgueil, comme Montbrun, comme tous ceux de sa caste ? Pourquoi n’aurait-il pas voulu que Montbrun humiliât l’or-

  1. Tome 1er, p. 283 et 285.