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Les compagnons d’Halaou qui y ont échappé se précipitent hors des appartemens de Bauvais ; ils font un appel à leurs camarades pour venger la mort de leur chef. Alors survint une mêlée affreuse entre eux et les hommes de la légion. Le combat devint inégal entre cette troupe bien armée, bien exercée, pourvue d’artillerie et de cavalerie, et des hommes fanatisés par des superstitions grossières, qui, dans leur ignorance non moins grossière, agitaient en l’air des queues de bœuf pour rendre inefficaces la mitraille et les balles qui pleuvent sur eux. Ils sont forcés de fuir, en faisant autant de mal que possible à leurs ennemis. Ils sont poursuivis hors de la Croix-des-Bouquets, et se répandent dans les plaines et dans les montagnes voisines.

Dans ce combat, si Bauvais fut peiné, fâché du meurtre d’Halaou, il comprit néanmoins qu’il ne pouvait abandonner à eux-mêmes ses valeureux compagnons qui se dévouaient pour lui : aidé de Marc Borno, il dirigea leurs forces pour rester maître du champ de bataille. La Croix-des-Bouquets et toute la plaine du Cul-de-Sac restèrent dès ce jour plus soumises à son autorité ; il prit des mesures en conséquence.


Essayons maintenant de nous expliquer à nous-même le vrai motif, la vraie cause de la mort d’Halaou. Et d’abord posons-nous cette question : Pinchinat, Montbrun et Marc Borno, ont-ils pu croire réellement que Sonthonax avait donné l’ordre de l’assassinat de Bauvais ? Nous ne le pensons pas. S’ils le croyaient capable d’une action aussi noire, Montbrun surtout l’aurait redoutée pour lui-même ; car déjà il se montrait revêche à l’autorité du commissaire, en raison de ses dé-