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Villatte, héritiers des sentimens généreux de Chavanne, pour comprendre l’avenir de leur race dans ce pays, pour entourer Polvérel et Sonthonax de leur affection et de leur concours dans l’accomplissement de leur œuvre ?

Sans doute, nous comprenons ce qu’a dû ressentir la commission des colonies, où se trouvaient des hommes tels que Grégoire, ce constant ami des noirs, Garran de Coulon, cet impartial écrivain, lorsqu’elle faisait son judicieux Rapport à la convention nationale, et qu’elle constatait les torts des hommes de couleur qui trahirent la cause de la liberté générale, à cette époque de honteuse mémoire pour ces traîtres ; car nous-même, qui écrivons ces lignes soixante ans après ces faits, nous pouvons à peine contenir notre indignation. Mais nous nous sommes imposé la mission de l’historien, qui consiste à mettre sous les yeux de la postérité toutes les considérations qui peuvent faire absoudre ou condamner les acteurs de ces temps reculés. Nous le répétons ; nous ne les justifions point, nous expliquons leur conduite.

Précédemment, nous avons exprimé notre appréciation du caractère et des sentimens de Savary aîné. Dans les circonstances dont s’agit, nous croyons encore que ce fut à sa funeste influence sur les hommes de couleur du quartier de l’Artibonite, qu’on dut les défections qui y eurent lieu. Afin de masquer la conspiration qu’il ourdissait, il persuada Sonthonax qu’on formait un complot pour l’assassiner : c’était un moyen que probablement il imagina pour éloigner ce commissaire de Saint-Marc où sa présence le gênait. Garran rapporte que « les déclarations que Sonthonax a produites pour constater ce fait sont très-informes ; et l’on sait, ajoute-t-il, combien de pareils actes sont suspects, surtout dans