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en dehors de toute autorité nationale, si d’autres motifs n’existaient pas.

Qu’on ne perde pas de vue, en effet, la pétition des habitans de Saint-Marc à Sonthonax, en mars 1793 ; qu’on se rappelle ensuite la récente désapprobation publique de Polvérel, donnée à la proclamation de son collègue du 29 août, et l’interdiction qu’il mit à sa publication dans toute la province de l’Ouest et dans celle du Sud ; le désaccord connu de tous, de Delpech avec ses collègues. Après cela, que l’on considère quelle influence dut exercer sur le sentiment de l’intérêt personnel, parmi les nègres et mulâtres anciens libres, la conduite des officiers français traîtres à leur patrie, et celle des premiers généraux noirs du Nord, Jean François, Biassou et Toussaint Louverture, qui restaient toujours attachés à la cause de l’Espagne, qui se refusaient à accepter le glorieux et honorable titre de citoyen français et la liberté générale pour leurs frères, qui conviaient tous les commandans militaires à la trahison, qui secondaient si puissamment les colons, les émigrés, unis aux Anglais, pour s’emparer de Saint-Domingue, chasser les commissaires civils et rétablir l’esclavage. Joignez à toutes ces considérations, l’inconcevable décret d’accusation lancé contre ces commissaires, parce qu’ils avaient été envoyés dans la colonie par Brissot, Clavière, Rolland et leurs amis, tous Amis des noirs. Quand ces défenseurs des noirs dans l’assemblée nationale de France étaient accusés et emprisonnés, et que les représentans de leurs idées, de leurs sentimens philantropiques, à Saint-Domingue, étaient appelés à partager leur sort affreux, ne fallait-il pas toute l’élévation d’âme des Pinchinat, des Bauvais, des Rigaud, des Chanlatte, des Montbrun, des