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circonstances les plus impérieuses. Ce fait, qui peut importer à l’histoire, est au surplus absolument étranger à la légalité de l’affranchissement général. Des esclaves sont en état de guerre perpétuel avec leurs maîtres et avec le gouvernement qui maintient l’esclavage. Ils ont le droit de revendiquer par toute sorte de moyens, même par la force, la liberté dont ils ne peuvent être privés que par la violence. Ils font preuve d’une grande modération en recourant au droit de pétition ; mais, quelle que soit leur attitude, on ne doit pas les refuser, on ne peut pas le faire sans manquer à la justice naturelle, et perpétuer l’état de guerre. »

Dufay dit aussi : « Les Espagnols et les Anglais, auxquels s’étaient déjà réunis un grand nombre de contre-révolutionnaires, étaient là tout prêts, qui appelaient les esclaves et leur tendaient les bras. Les Espagnols leur offraient même de l’argent avec la liberté, et même des grades supérieurs. Il ne fallait pas laisser échapper » l’instant favorable, sans quoi tout était perdu… Au reste, si nous devions perdre nos colonies (ce que je suis très-loin de croire ni de craindre), n’était-il pas plus glorieux d’être juste, et plus raisonnable de faire tourner cette perte au profit de l’humanité ? Dans cette extrémité pressante, le commissaire en résidence au Cap, rendit la proclamation du 29 août. »

Lisons donc cette célèbre déclaration du droit des esclaves de toutes couleurs, d’être libres à Saint-Domingue. Voyons comment Sonthonax a résolu cette question qui tenait les noirs en insurrection depuis deux ans.

Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits : voilà, citoyens, l’Évangile de la France ; il est plus que temps qu’il soit proclamé dans tous les départemens de la république.