Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/220

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

travailleurs dans leurs ateliers respectifs, fut suivie par tous les chefs qui commandèrent le pays jusqu’à Pétion. Ils abusèrent tous de cette mesure dictée aux commissaires civils, par le désir d’une utile subordination de ces cultivateurs aux propriétaires ; ils en firent des serfs attachés à la glèbe. Pétion, le premier, les affranchit de ce servage ; après lui, Boyer et ses successeurs respectèrent cette émancipation fondée sur la justice.


Après avoir concouru avec son jeune collègue aux vigoureux actes que nous avons énumérés dans ce chapitre, Polvérel, dont on reconnaît aisément l’esprit de sage organisation dans la plupart, se sépara de nouveau de lui pour se porter dans l’Ouest, où sa présence était réclamée par la situation de cette province. Il quitta le Cap à la fin de juillet 1793, et n’y reparut plus.

Peu de jours après son départ, Sonthonax adressa une dépêche à la convention nationale, en date du 30 juillet. Il lui rendit compte des événemens accomplis depuis celle du 10 du même mois.

« Nous sommes résolus à tout, dit-il, plutôt que de nous rendre. Seul, avec le général et quelques officiers, dignes par leur patriotisme de coopérer à l’inauguration de la liberté dans le Nouveau-Monde, nous mangerons des patates et des bananes quand les vivres d’Europe nous manqueront ; notre entreprise est trop glorieuse pour que les obstacles nous effraient…

Il vous reste maintenant, citoyens représentans, une grande question à juger : c’est l’état des personnes non libres dans la colonie. Le temps des tergiversations, des faux ménagemens, du modérantisme hypocrite est passé. Les préjugés qui aveuglaient les esclaves ne sont plus ; et la con-