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reprit le camp de la Tannerie ; il reprit aussi le camp Lesec. Le manque de munitions l’empêcha de continuer ses succès : le crime de Galbaud parut alors plus grand ; il avait fait détruire les poudres de l’arsenal et des forts du Cap avant de partir.

Les commissaires civils essayèrent de nouveau de gagner Jean François ; à cet effet, ils députèrent auprès de lui, Macaya sur l’esprit duquel l’abbé de La Haye, devenu membre de la commission intermédiaire, avait quelque crédit. Mais Macaya ne reparut point : l’abbé de La Haye lui écrivit et lui demanda une entrevue qu’il consentit à avoir avec Polvérel, après bien des précautions prises pour sa sûreté personnelle ; il venait d’être fait maréchal de camp par les Espagnols. À toutes les propositions, à tous les raisonnemens que fît Polvérel à cet esprit inculte et barbare, Macaya répondit toujours : « Je suis le sujet de trois rois, du roi de Congo, maître de tous les noirs ; du roi de France, qui représente mon père ; et du roi d’Espagne, qui représente ma mère. Ces trois rois sont les descendans de ceux qui, conduits par une étoile, ont été adorer l’Homme-Dieu. Si je passais au service de la République, je serais peut-être entraîné à faire la guerre contre mes frères, les sujets de ces trois rois, à qui j’ai promis fidélité. »

Il est bien entendu que cette réponse était formulée dans le langage créole le plus grossier. Macaya était un Africain ; il prit une grande part en 1802 et en 1805 dans la lutte contre l’armée française. Il vivait encore, en 1820, à la mort de H. Christophe. Ce côté facétieux de son entrevue avec Polvérel, toujours grave et austère, prouve que les prêtres espagnols suivaient ponctuellement les instructions données à l’archevêque de Santo--