Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/149

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour leur notifier l’objet de sa mission, qui était de faire exécuter la loi du 4 avril, en réintégrant dans la possession de leurs propriétés et de tous leurs droits les hommes de couleur qui avaient été chassés de la Grande-Anse. C’était le 18 juin. Une réponse y fut faite pour éluder la question : les blancs voulaient négocier. Mais la délégation leur répliqua le même jour qu’elle ne pouvait pas composer sur sa mission, et que si ces habitans persistaient dans leur refus, elle se verrait contrainte de les traiter comme ennemis de la République. Une nouvelle réponse de ces colons décida la délégation à faire attaquer le camp.

Le 19 juin, à six heures du matin, Rigaud ordonna à sa troupe de marcher en avant. Mais elle fut prévenue par l’artillerie ennemie, dès qu’elle se trouva à portée du canon. L’assaut fut alors ordonné. Jourdain reçut une balle au début de l’affaire ; néanmoins il resta sur le champ de bataille pour encourager ses compagnons. Á 9 heures du matin, malgré toute la valeur déployée par les républicains, ils furent forcés de renoncer à leur entreprise. En ce moment, Jourdain fut emporté par un boulet. Ignace, ayant reçu un éclat de pierre produit par un autre boulet, et voyant la troupe ennemie sortir des remparts à la poursuite des siens, se donna la mort pour n’être pas fait prisonnier.

La déroute des républicains fut complète ; ils ne purent enlever leurs morts, et beaucoup de blessés tombèrent au pouvoir de l’ennemi qui poursuivit les fuyards.

Ils regrettèrent leurs braves compagnons qui périrent dans cette action malheureuse. Jourdain et Ignace furent surtout pleures de toute l’armée. Leur carrière fut courte, mais honorable. Jourdain marqua la sienne par un acte