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Grande-Anse et de Tiburon : ils trouvèrent dans les précédens de l’ancien régime que nous venons de rappeler, une très-grande facilité à opérer cet armement. C’est alors que ceux de Tiburon furent confiés à la conduite de l’un d’eux nommé Jean Kina qui devint fameux sous l’occupation anglaise. C’était en décembre 1791, en même temps qu’au Port-au-Prince, les colons formaient les compagnies d’africains sous la conduite de Cayeman[1].

Au moyen de tels auxiliaires, les colons, on le conçoit bien, parvinrent facilement, non-seulement à comprimer les efforts des hommes de couleur, mais à les chasser des deux quartiers de la Grande-Anse et de Tiburon, à en arrêter un grand nombre qu’ils firent de nouveau embarquer sur des navires, avec leurs femmes et leurs enfans, et auxquels ils eurent la scélératesse d’inoculer la petite vérole, pour les moissonner plus vite par les ravages de cette horrible maladie. Ceux qui réussirent à se sauver, se rendirent dans la paroisse du Petit-Trou-des-Baradères, limitrophe du Corail ; ils y trouvèrent Jourdain. D’autres, au nombre desquels étaient les deux frères Blanchet[2], se rendirent aux Cayes sous la protection de Polvérel, en passant par les hautes montagnes du Macaya et de la Hotte. C’étaient dans les derniers jours de février 1793. Le 2 mars, Polvérel écrivit vainement à la municipalité de Jérémie contre ces persécutions.

Déjà, comme nous l’avons dit, les colons de ces deux

  1. Voyez les Débats, t. 1er, p. 291 et 293 ; — t. 2, p. 163 et 165 ; — t. 3 p. 172 et suivantes, 183 et 188, etc. Jean Kina était l’esclave d’un blanc nommé Laroque, fondé de procuration de Page. (Débats, t. 3, p. 176.)
  2. Blanchet aîné, devenu secrétaire d’Élat de la République d’Haïti ; Blanchet jeune, général, président de l’assemblée constituante de 1806.