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que ce n’était pas trop dire, car personne ne soutiendra que Louis Capet fût l’ami de la liberté des noirs…

J’avais donné aux hommes de couleur trois souslieutenances dans les régimens de ligne. Aussitôt on fait circuler dans la ville du Cap la lettre de Cougnac-Mion… Je n’hésitai pas alors à consigner de nouveau cette déclaration dans ma proclamation du 4 décembre 1792. J’ajoutai, que si l’assemblée nationale changeait au régime des propriétés mobilières des colons, au régime colonial fixé par les lois de l’assemblée constituante relativement à l’esclavage des noirs, je ne me rendrais jamais l’exécuteur d’une pareille injustice, que je m’y opposerais de toutes mes forces. Certes, je conviens bien que cette déclaration était au-dessous du caractère du commissaire civil, que les termes dans lesquels je l’ai faite, sans être criminels, compromettaient cependant mon caractère, qui devait être ferme et impassible ; mais j’oubliais un instant ce que je devais à moi-même, à la représentation de la République, pour ne songer qu’au salut de la ville du Cap. On était menacé d’y voir régner les factieux, d’y voir entrer les noirs en révolte prêts à fondre sur la population blanche… Ce fut alors que je dis que si l’assemblée nationale voulait toucher un jour au régime colonial en ce qui concernait l’esclavage, je m’y opposerais de toutes mes forces. Cette déclaration, je l’avoue, était au-dessous du caractère d’un représentant de la République, mais elle n’était pas criminelle, et je le prouve en deux mots. Pour qu’elle fût criminelle, il faudrait que cette insurrection annoncée contre les décrets de l’assemblée nationale eût eu un objet irrégulier et criminel ; or, quel était-il, mon objet ? Que dans le cas où