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Tels sont les motifs de cet acte où les commissaires civils établissent clairement que le fait de la révolte des esclaves ne peut être imputé à ces malheureux, mais bien aux hommes libres, à des Français, — les Européens, — à des fils de Français, — les colons. C’est sur leurs têtes qu’il faut frapper, disent-ils, si l’on veut faire cesser les insurrections des esclaves : ils constatent de plus que les esclaves sont traités avec inhumanité, qu’on n’exécute pas les lois qui ont pourvu à leur bon traitement.

Voilà donc les commissaires civils qui se présentent comme les protecteurs des infortunés qui gémissent depuis près de deux siècles sous les dures lois de l’esclavage. Que vont-ils ordonner en leur faveur ? Passons au dispositif de cette proclamation.

Le 1er article remet en vigueur les ordonnances de Louis XIV, du mois de mars 1685 (code noir), de Louis XV, en 1724, et de Louis XVI, du 3 décembre 1784.

Ces différentes lois réglaient la police et la discipline des ateliers, qui sont maintenues par la proclamation du 5 mai, sauf quelques modifications dont le but est d’assurer aux esclaves l’exécution des dispositions favorables qu’elles contenaient et qui n’étaient pas toujours suivies par les maîtres. Ainsi, l’empêchement mis aux travaux des dimanches et fêtes ; l’assignation d’un petit terrain sur chaque habitation à chacun des esclaves, pour la plantation de vivres et de légumes à son profit personnel ; l’obligation imposée aux propriétaires de faire des plantations de vivres spéciales pour garantir les esclaves de la disette ; de délivrer tous les ans à chacun d’eux deux habillemens, appelés rechanges