missaires civils. Daugy, président de l’assemblée coloniale, leur adressa un discours insidieux où il supposait que les commissaires arrivaient avec des instructions secrètes pour préparer l’affranchissement des esclaves. Il y déclarait toutefois que le décret constitutionnel du 24 septembre 1791, en réservant la décision de cette question à l’assemblée coloniale, lui en donnait le droit à elle seule ; et il prétendit justifier l’esclavage des noirs, comme indispensable à la prospérité de la colonie et de la métropole. Ce discours est un chef-d’œuvre de l’astuce coloniale. Daugy mettait évidemment en usage cette tactique adroite, pour forcer les commissaires à s’expliquer sur ce sujet important.
« Nous sommes dans vos mains, dit-il, comme le vase d’argile que vous pouvez briser à l’instant même ; c’est donc aussi l’instant, et peut-être le seul, de vous faire connaître une vérité importante, mal connue de MM. les commissaires nationaux civils, vos prédécesseurs.
» Cette vérité, sentie à la fin par l’assemblée constituante, c’est qu’il ne peut point y avoir de culture à Saint-Domingue sans l’esclavage ; c’est qu’on n’a point été chercher et acheter à la côte d’Afrique cinq cent mille sauvages esclaves pour les introduire dans la colonie, en qualité et au titre de citoyens français ; c’est que leur existence comme libres y est physiquement incompatible avec l’existence de vos frères européens…
» Nous avons déclaré, par un décret du mois de mai dernier, que l’esclavage des noirs était irrévocablement maintenu dans les colonies, etc. »
Les commissaires civils se virent donc, en quelque sorte contraints, dans la séance même, de donner le dé-