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d’ailleurs dans les actes les plus secrets des commissaires civils, qu’ils se soient déterminés par des sentimens personnels de haine et de cupidité. Les tristes usages de la guerre, auxquels l’imperfection de la police laisse encore usurper le nom de lois, les auraient autorisés à instituer des tribunaux militaires, qui pardonnent bien rarement aux vaincus. Ils avaient devant les yeux les commissions prévôtales que l’assemblée coloniale avaient établies dans toutes les paroisses de la colonie. Ils se détournèrent de ces institutions barbares, et ne firent juger personne dans la colonie, parce qu’ils n’y auraient pu trouver des tribunaux impartiaux… enfin, ils étaient formellement autorisés par les décrets qui réglaient leurs pouvoirs, à faire ces déportations, en envoyant à la métropole les motifs de leurs arrêtés et les pièces justificatives. »

On ne peut que se ranger du côté de ces raisonnemens si sages, et si conformes aux sentimens d’humanité qui devraient toujours guider les hommes. C’est dans les dissensions intestines des peuples, c’est dans les guerres civiles surtout que ces sentimens devraient toujours prévaloir, pour atténuer les maux inévitables qu’entraînent ces perturbations dans l’ordre social. Mais hélas ! combien n’aurons-nous pas à nous indigner, dans la suite de cette histoire, de ce que cet exemple tracé aux colons de Saint-Domingue ait été méconnu par eux, quand de nouvelles circonstances leur eurent donné la faculté d’exercer une grande influence sur les gouvernemens qui se succédèrent dans ce pays ! Nous les verrons acharnés à poursuivre de leur haine implacable des hommes qu’ils ne considérèrent toujours que comme des ennemis, et les désigner à la fureur d’un pourvoit hypocrite ou à celle