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esprits judicieux, par le patriotisme qu’il y avait déployé ; ses lumières, sa modération, même dans les circonstances où il avait paru très-énergique pour soutenir son pouvoir, étaient des garanties pour la nation. Les opposans, quels qu’ils fussent, pouvaient-ils lui en offrir autant ? Au fait, l’arme de l’Opposition n’était maniée que par des avocats qui n’avaient jamais pratiqué les affaires publiques, et qui, par ce motif, ne pouvaient pas inspirer la même confiance que ce chef ; on fût resté sourd à toutes leurs déclamations postérieures, tout en leur tenant compte, sans doute, des réclamations qu’ils avaient faites en faveur du progrès.

Il est, pour tout gouvernement qui est attaqué par l’opinion publique, un moment solennel qu’il faut savoir saisir afin de la ramener à lui ; s’il laisse échapper cette occasion, il est perdu ! Malheureusement pour le pays, tel devait être le sort de celui de Boyer ; les défauts de son caractère l’y entraînaient, malgré les lumières de son esprit.

On a vu, dans le chapitre précédent, quelles étaient ses dispositions au 6 février, à propos de quelques mesures qui lui furent conseillées par le général Inginac. Celui-ci, par ses ordres, avait fait rédiger le projet de loi sur l’instruction publique, le seul qui fût préparé pour la session législative ; mais Boyer en avait fait retrancher ce qui concernait l’établissement d’écoles secondaires dans les principales villes qui n’auraient point de lycées, telles que les Gonaïves et Saint-Yague, chefs-lieux de département, Jacmel et Jérémie, chefs-lieux d’arrondissement. Voici un extrait de son message à la Chambre des communes, en lui adressant ce projet :

« Le projet de loi qui accompagne le présent message établit une école primaire dans chaque chef-lieu d’arrondissement où il n’en existe pas encore. De cette manière