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pitaine Joute Lérissé, arrêté comme complice, se donna un coup de couteau dans le ventre et n’en mourut pas, ayant été soigné ; mais il fut condamné avec d’autres à un emprisonnement durant quelques années. Dans cette affaire, des soupçons planèrent sur l’ancien représentant de Saint-Marc, nommé Adam, qui était un ami du général Guerrier et qui avait obtenu antérieurement l’estime et la confiance du général Bonnet[1].

Quelques jours après la publication de la proclamation de Boyer, les principaux officiers militaires de la garnison du Port-au-Prince lui présentèrent une adresse collective signée d’eux, par laquelle ils le remercièrent d’avoir fait une mention honorable de la conduite tenue par les troupes, durant les récentes agitations, et d’avoir dit « qu’elles avaient bien mérité de la patrie. » Ils lui rappelèrent tous les principaux évènemens antérieurs ; que durant la guerre de l’indépendance et longtemps après, les troupes haïtiennes ne recevaient ni solde, ni rations, ni vètemens, et qu’elles n’ont pas moins toujours agi sous les ordres de leurs chefs, dans l’intérêt de la patrie ; qu’aujourd’hui et depuis longtemps, les troupes recevaient du gouvernement tous leurs besoins et qu’elles ne pourraient être dupes des factieux qui essayaient de les flatter pour les entraîner au désordre et à méconnaître leurs devoirs envers le chef de l’État ; qu’elles reconnaissaient clairement que ces factieux voulaient la révision de la constitution, pour y introduire

  1. À la fin de la même année, le général Bonnet vint au Port-au-Prince, et j’eus occasion de causer ave lui de cette affaire. Il me dit qu’il était convaincu qu’elle avait été le fruit des menées secrètes du général Guerrier, de même que la révolte d’Izidor ; qu’il était venu à la capitale expressément pour affirmer à Boyer toutes les particularités qui motivaient sa conviction, mais que le Président, influencé par Inginac, ne la partageait pas. Il est certain du moins qu’Inginac était l’antagoniste de Bonnet et suggérait souvent des préventious contre lui, peut-être par réminiscence de la scission du Sud, en 1810. Sans la présence de Bonnet à Saint-Marc, le Nord eût prononcé la sienne dans l’espoir d’y en traîner l’Artibonite.