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Haïti comme dans tous les autres pays d’Amérique. Jusqu’alors il avait suffi, pour toutes les transactions commerciales et autres du pays, d’environ un million de gourdes, de monnaie nationale frappée à l’effigie de Pétion et de Boyer, d’environ dix-huit cent mille gourdes de monnaie à serpent (l’hôtel des monnaies n’en ayant produit que 1,100,000 et les 700,000 autres étant venus de l’étranger en contrefaction) et de la monnaie d’Espagne qu’importait le commerce ; mais la crise financière dont s’agit avait fait disparaître une partie de cette dernière. La circulation était donc gênée, en même temps que le fisc ne percevait, en 1826, que 2,303,408 gourdes en recettes contre 3,648,986. gourdes de dépenses.

Le 25 septembre, Boyer publia un arrêté qui ordonna l’émission, par le trésor général, de billets de caisse, d’une valeur nominale d’une, de deux et de cinq gourdes, imprimés et attachés à des cahiers à souches avec une série de numéros ; ils étaient signés par le trésorier général et contre-signés par les membres de la chambre des comptes et par le secrétaire d’Etat[1]. Toute falsification ou contrefaction de ces billets entraînait les peines portées contre les faux monnayeurs.

Telles furent les causes et l’origine de ce papier-monnaie qui dut circuler dans la République comme argent, servir comme tel aux dépenses du trésor et y être reçu en payement des impôts de toutes sortes. Nul individu ne pouvait le refuser ou le recevoir pour une valeur au-dessous de sa valeur nominale[2]. Dès lors, aucune prévision humaine ne

  1. Avant la fin de 1826, le trésor général mit en circulation 222,600 gourdes en billets de toutes valeur. Cette idée fut suggérée par A. Nau, trésorier général.
  2. À l’apparition des billets de caisse, un négociant anglais, M. Maunder, essaya de les refuser : on le menaça de lui retirer sa patente, et il se soumit à l’arrêté du Président.