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des citoyens, qui eut lieu au palais national, le courageux Magny soutint hautement l’information qu’il avait donnée au Président d’Haïti, en sa qualité de commandant d’arrondissement chargé du maintien de l’ordre ; il y ajouta tout ce que lui suggéraient sa profonde conviction politique et sa longue expérience des affaires de son pays, pour reprocher à ceux dont il se plaignait la légèreté de leur conduite en cette circonstance. Son ancienneté militaire, son honorable conduite dans tous les temps, l’estime générale dont il jouissait, tout contribua à donner un grand poids à sa parole. Boyer ne put qu’y déférer, sachant combien il était sincère dans son dévouement à la patrie ; et après avoir parlé lui-même à cette assemblée, avec cette modération qui inspire la confiance, avec cette intelligence des choses qui fait naître la conviction, avec cet accent du patriotisme qui le distinguait et qui se communique par la persuasion, afin de prouver à ses concitoyens du Nord qu’il n’avait pu sacrifier les intérêts de la nation, il considéra néanmoins qu’il devait se montrer assez ferme pour interdire toute velléité de troubler l’ordre public.

Il ordonna aux généraux Toussaint et Nord Alexis et au citoyen Eusèbe, de se rendre au Port-au-Prince immédiatement. Le premier était sans emploi, le second ne pouvait plus occuper celui de commandant de place au Cap-Haïtien, après avoir été dénoncé par le commandant de l’arrondissement, et ce fut regrettable ; car Nord Alexis était un excellent officier, bien propre aux fonctions qu’il remplissait depuis la conspiration de Richard. Ce qu’il y eut encore de regrettable, c’est que le général Toussaint, dont nous avons parlé aussi avec éloges, à propos de sa conduite à Samana, arrivé sur le bord de l’Artibonite, se fit sauter la cervelle par un coup de pistolet. Cet acte de