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tée ; car avant eux, le gouverneur et l’intendant pouvaient statuer sur de pareilles demandes, en vertu de la décision prise par le marquis de Larnage, gouverneur, et l’intendant Maillart, deux des meilleurs administrateurs qu’ait eus Saint-Domingue. Ce fut sous eux que l’on facilita l’admission dans la classe blanche, de beaucoup de sang-mêlés, se disant issus de race indienne. Mais, au temps de MM. de Nolivos et de Bongars, le préjugé avait fait des progrès, et ces deux administrateurs voulurent qu’un ordre ministériel vint le fortifier. Ce fut donc à la suggestion, à la sollicitation des colons, que l’autorité royale consacra de plus en plus le préjugé de la couleur.

Comme toutes les autres puissances qui ont fondé des colonies en Amérique, la France a eu sans doute sa part de torts dans l’établissement de l’esclavage des noirs, dans le maintien de cette horrible institution et dans l’institution du préjugé de la couleur ; elle a eu d’autres torts, et nous les signalerons à mesure que les événemens se dérouleront. Mais c’est surtout des colonies que sont venues les demandes réitérées, pour aggraver la malheureuse condition des esclaves, pour étendre contre leurs descendans l’effet du préjugé de la couleur.

Hilliard d’Auberteuil, qui a publié son ouvrage pendant que le comte d’Ennery gouvernait Saint-Domingue, avait saisi cette occasion pour dénoncer au ministre de la marine cet administrateur intègre qui s’indignait tellement des abominations commises par les blancs dans cette colonie, qu’il dit à cette occasion : Saint-Domingue est une seconde Sodome que le feu du ciel doit dévorer

Paroles prophétiques qui se sont réalisées quinze ans plus tard ! Les noirs se sont rendus les agens du ciel ; et