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de beaucoup d’autres documens, des motifs donnés dans les actes de la métropole, et de la conduite des colons durant tout le cours de la révolution, une chose qu’il est extrêmement important de constater c’est que, si le code noir, dans ses dispositions relativement favorables aux esclaves, a été modifié successivement par Louis XIV lui-même, par Louis XV surtout, même par Louis XVI, ce fut à la suggestion, à la sollicitation des colons. Les gouverneurs généraux, les intendans de la colonie qui, la plupart, se rendaient propriétaires de grandes habitations à Saint-Domingue, devenant colons eux-mêmes et subissant l’influence de ce régime barbare, se prêtaient admirablement aux vues de ces possesseurs d’esclaves, rendaient des ordonnances à cet effet et les faisaient consacrer par de nouveaux édits émanés de la toute-puissance royale, ou par des instructions ministérielles. Les conseils supérieurs de justice agissaient dans le même sens.

C’est donc à tort, selon non, que dans son ouvrage où nous trouvons des pensées judicieuses, des sentimens honorables, un auteur moderne a dit[1] :

« On s’aperçut, en France, que le germe déposé dans le code noir se développait rapidement, et comme l’esclavage semblait une institution aussi précieuse alors, qu’elle paraît embarrassante aujourd’hui, on enraya l’œuvre qui menaçait de s’accomplir. On fit deux parts de l’édifice de Colbert : l’une, celle des dispositions généreuses et libérales, que l’on se prit à saper et à détruire ; l’autre, celle de la pénalité, que l’on étaya

  1. M. Lepelletier de Saint-Rémy. Étude et solution de la question haïtienne t. 1er , p 105 et 107.