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La nomination des trois commissaires civils eut lieu sous le ministère de Roland.

Ailhaud, dont le caractère faible a décidé son départ de Saint-Domingue, peu de temps après son arrivée, n’y a joué qu’un rôle secondaire. Il n’en est pas de même de Polvérel et de Sonthonax.

Polvérel était un avocat distingué avant la révolution de 89, tant au parlement de Bordeaux qu’à celui de Paris, où il s’attira quelques persécutions par son zèle à défendre les libertés nationales[1]. Il fut membre des États généraux de la Navarre qui le chargèrent d’une mission près l’assemblée constituante, siégeant alors à Versailles. Il remplit ensuite diverses fonctions à Paris, dont la plus relevée était celle de membre du conseil général de cette commune : c’est là qu’il fut pris pour être envoyé à Saint-Domingue, en qualité de commissaire civil. Durant les premiers temps de la révolution, il fit beaucoup d’écrits en faveur de ce grand mouvement national. Sa réputation porta divers colons, membres de l’assemblée de Saint-Marc, à s’adresser à lui, en 1790, pour défendre les actes de cette assemblée : c’étaient Valentin de Cullion, Borel, Bacon La Chevalerie et Thomas Millet qui, tous, y jouèrent un si grand rôle. Son refus de se charger de leur défense, la condamnation qu’il eut la franchise de porter, au contraire, contre les prétentions de l’assemblée de Saint-Marc, le mirent en suspicion dans l’esprit des colons en général, dès qu’ils apprirent sa nomination, due à l’influence des Girondins et des Amis des noirs. Dans l’un de ses écrits

  1. Nous avons ouï dire, qu’interdit pour quelques mois par le parlement de Paris, Polvérel fit cette fière réponse après la lecture de l’arrêt : « Et moi, plus puissant que la cour, je m’interdis pour toujours. »